'A la première personne' Commentaires des peuples autochtones et des représentants de la société civile à la Commission africaine, Abuja, Nigeria
Nadine Mballa, CED, Cameroun
Pourquoi avez-vous décidé d'assister à la réunion de la Commission africaine ? « Je suis venue parce que le FPP m'en a donné la possibilité. Je travaille sur la question autochtone, et la Commission africaine permet aux représentants d'ONG de s'exprimer sur des questions liées aux droits humains. Je suis ici pour essayer de sensibiliser les gens aux violations des droits des peuples autochtones qui sont commises dans mon pays.
Je voudrais aussi convaincre les Commissaires de mettre en place un Groupe de travail sur les ressources naturelles. Nous sommes tous conscients du fait que les vies des peuples autochtones sont étroitement liées aux ressources naturelles. Notre continent se trouve actuellement confronté à de nombreux problèmes environnementaux, aussi devons-nous attirer l'attention de la Commission sur le droit élémentaire à un environnement sans danger. C'est le droit de chacun, et ce droit est mentionné dans la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples. »
Quelle est la question la plus importante pour vous à la Commission ? « Pour moi, la question la plus importante, c'est le Groupe de travail sur les ressources naturelles. Chez nous, beaucoup de violations des droits humains ont trait aux ressources naturelles. De nombreux peuples autochtones ont été expulsés de leurs terres ancestrales. Comme ils n'ont pas de terres, ils ne peuvent pas prendre part au partage des bénéfices dérivés des ressources naturelles.
Ils n'ont pas accès au développement, car la loi est formulée de telle sorte qu'ils n'ont pas le droit de vendre les produits. Comme ce sont des chasseurs cueilleurs, ils récoltent eux-mêmes des produits comme le miel, mais ils n'ont pas le droit de vendre ces produits pour envoyer leurs enfants à l'école ou pour payer le sel ou toutes les autres choses dont ils ont besoin pour survivre.
Comme il y a une loi qui leur interdit de les vendre, ils ne peuvent que manger ou utiliser eux-mêmes les produits qu'ils récoltent. Beaucoup de ces gens se font arrêter, et leurs produits sont confisqués par des responsables nommés par le ministère.
C'est à l'État qu'appartiennent les terres et les forêts, et en vertu de la loi, si vous voulez être propriétaire de la terre, vous devez construire une maison. Or le mode de vie des peuples autochtones ne leur permet pas de rester au même endroit, alors ils ont beaucoup de mal à devenir propriétaires de terres. »
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Marie Louise Issanda Tabena, CAMV, République démocratique du Congo
Pourquoi êtes-vous présente à la réunion de la Commission africaine ? « Mon organisation, le CAMV, a présenté un ''contre rapport'' à la Commission africaine. Elle a agi ainsi car la République démocratique du Congo a envoyé son rapport d'État à la Commission. Tous les deux ans, l'État est tenu de présenter un rapport sur la situation de la mise en application des différents droits garantis par la Charte africaine.
Comme les États sont tenus de soumettre un rapport tous les deux ans, les ONG ont aussi la possibilité de présenter un ''contre rapport''. En général, c'est le contre rapport qui indique clairement la situation des droits humains.
Nous avons demandé à bénéficier du statut d'Observateur à la Commission, mais cela ne nous a pas encore été accordé. Cela signifie que nous n'avons pas le droit d'intervenir de nous-mêmes durant la session. Cependant, le Forest Peoples Programme a le statut d'Observateur, et interviendra donc pour nous inviter à prendre la parole.
Dans notre rapport, nous présentons de nombreuses recommandations, en mettant l'accent sur les droits sociaux et économiques des peuples ''pygmées'' autochtones en République démocratique du Congo, les recommandations concernant la santé, beaucoup de choses... Notre rapport sera pris en compte par la Commission africaine, tout comme la déclaration que nous lirons durant la session.
Les recommandations que la Commission fera à l'État sont vraiment importantes pour nous et pour notre travail, et nous surveillerons l'évolution des événements pour voir si elles sont bien suivies. Les recommandations nous aideront aussi à préparer nos rapports au niveau international.
Je suis aussi venue car on m'a informée que la troisième séance de formation du FPP sur la Commission africaine aurait lieu à Abuja. La première séance de formation portait sur les éléments de base, et cette fois-ci, la formation va mettre davantage l'accent sur la mise en pratique. Après avoir suivi cette formation, quand je rentrerai chez moi, je pourrai dire à mes collègues et aux communautés comment utiliser la Commission. »
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Habyar'Imana Elias, Président de l'UOBDU, Ouganda
Pourquoi avez-vous assisté à la réunion de la Commission africaine ? « Je suis ici pour apprendre comment fonctionne la Commission africaine, en particulier comment la Commission africaine peut se battre pour les droits des peuples. Je veux aussi apprendre d'autrui, pour pouvoir partager cette expérience avec mon peuple quand je rentrerai chez moi, afin que nous puissions surmonter les défis que représente la violation de nos droits. Les Batwa sont marginalisés et victimes de discrimination. Nos droits sont violés depuis bien longtemps, mais après cet événement je peux retourner chez moi et parler à d'autres gens, et nous pourrons alors élaborer une stratégie de lutte pour la défense de nos droits. »
Quelle est la question la plus importante pour vous, ici à la Commission ? « Le plus important, c'est de voir le gouvernement reconnaître les droits à la terre des Batwa. Nous voulons vivre dans un endroit où nous sommes respectés par les communautés avoisinantes, où nous avons une voix nous aussi. Pour être considéré comme un être humain, vous devez avoir une base, vous devez avoir une terre. Si le gouvernement est disposé à nous relocaliser et à nous verser une compensation, nous pourrons être comme tous les autres. »
Qu'est-ce que vous voulez ramener avec vous à votre communauté en Ouganda ? « De retour chez moi, je vais partager ce que j'ai appris au sujet de la Commission africaine, et je vais encourager ma communauté à être forte et à se battre pour ses droits, comme d'autres le font ici. Je vais leur faire comprendre que ce n'est pas seulement nous, les Batwa, qui avons de tels problèmes, d'autres peuples et minorités autochtones y sont aussi confrontés. Je vais leur dire de continuer à se battre pour leurs droits, et qu'un jour nous réussirons. »
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Jeanne Marthe Minkoue Mi-Ella, AGAFI, Gabon
Pourquoi avez-vous décidé d'assister à la réunion de la Commission africaine ? « Je suis ici pour représenter la voix des femmes autochtones au Gabon. Je souhaite que les femmes autochtones deviennent capables de s'exprimer et cessent d'être opprimées.
Je veux aider les femmes autochtones pour qu'elles puissent devenir plus fortes et savoir comment aller de l'avant. Les femmes autochtones font face à des problèmes similaires dans tout le continent africain. Les droits à la terre, à la santé et à l'éducation, et le manque de participation au processus de prise des décisions, ce sont tous des problèmes sérieux pour elles.
Pour que la situation des femmes autochtones change, il va falloir que les mentalités changent.
Nous désirons être le lien entre les femmes autochtones isolées et marginalisées et le gouvernement.
Un problème important, au Gabon, c'est qu'on dispose de très peu de données concernant les besoins des peuples autochtones, ou même la population autochtone.
Nous aimerions développer une approche participative avec les peuples et les femmes autochtones. »
Que comptez vous tirer de cette formation ? « J'espère établir des rapports avec des bailleurs de fonds et avec d'autres partenaires, pour nous permettre d'augmenter nos capacités. J'estime que la capacité de mon organisation est très limitée, et je crois que l'expérience que j'acquerrai ici sera bénéfique pour le développement de notre capacité sur le terrain. »
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Overview
- Resource Type:
- Reports
- Publication date:
- 11 November 2008
- Programmes:
- Legal Empowerment Access to Justice Law and Policy Reform