Convention sur la diversité biologique : plus aucune excuse pour reporter l’adoption de l’expression « peuples autochtones »
Tous les textes de la Convention sur la diversité biologique (CDB) et les décisions de la Conférence des Parties et de ses organes subsidiaires emploient l’expression « communautés autochtones et locales ». À l’occasion de sa neuvième session en 2010, l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones (UNPFII) a appelé les parties à la CDB à « adopter l’expression ‘peuples autochtones et communautés locales’ en vue de refléter correctement les identités distinctes que ces entités ont acquises depuis l’adoption de la Convention il y a près de 20 ans ».file:///C:/Users/Gemma/AppData/Local/Microsoft/Windows/Temporary%20Internet%20Files/Content.Outlook/SA05H8XZ/7_FPPENews_Oct2013_CBDIPs_CdJ_fr_edit.docx#_ftn1[1] Lors de sa dixième session en 2011, l’Instance permanente a par ailleurs déclaré que « Il est important de reconnaître le statut de ‘peuple’ des peuples autochtones pour que leurs droits soient pleinement respectés et protégés. »file:///C:/Users/Gemma/AppData/Local/Microsoft/Windows/Temporary%20Internet%20Files/Content.Outlook/SA05H8XZ/7_FPPENews_Oct2013_CBDIPs_CdJ_fr_edit.docx#_ftn2[2]
Néanmoins, malgré ces recommandations, la CDB continue à employer l’expression « communautés autochtones et locales ».
En octobre 2012, à l'occasion du septième Groupe de travail sur l’article 8 j) (WG8(j)-7) et de la onzième Conférence des parties (CdP 11) à la CDB, plusieurs Parties ont déclaré qu’elles étaient en faveur de cette modification terminologique, néanmoins il fut finalement décidé (dans la Décision XI/14) de reporter de nouveaux débats et d’examiner ultérieurement cette question ainsi que toutes ses implications pour la CDB et ses Parties au prochain WG8(j) (qui aura lieu ce mois-ci) et à la CdP 12 en 2014.file:///C:/Users/Gemma/AppData/Local/Microsoft/Windows/Temporary%20Internet%20Files/Content.Outlook/SA05H8XZ/7_FPPENews_Oct2013_CBDIPs_CdJ_fr_edit.docx#_ftn3[3]
Dans la décision XI/14, les Parties et les parties prenantes étaient invitées à faire part de leurs points de vue au Secrétariat concernant l’emploi de l’expression « peuples autochtones et communautés locales ». Quatre Parties et plus d’une centaine d’organisations autochtones et non gouvernementales ont transmis une soumission. Tous les points de vue fournis sont résumés dans le document de conférence officiel UNEP/CBD/WG8J/8/8. Une compilation complète des soumissions est disponible dans le document UNEP/CBD/WG8J/8/INF/10/ADD1, afin d’aider le Groupe de travail dans ses discussions au cours des semaines à venir. Les différentes soumissions soulignent que l’emploi de l'expression préférée « peuples autochtones et communautés locales » est lié au droit à l’identité, et que le terme « peuples » revêt un statut juridique particulier et tous les « peuples » ont le droit à l’autodétermination.
Néanmoins, à la fin du document UNEP/CBD/WG8J/8/8, le projet de recommandation pour la considération du WG8(j)-8 vise uniquement à ce que la CdP 12 adopte une décision consistant à noter les recommandations émanant des onzième et douzième sessions de l’UNPFII et à prier le Secrétariat de continuer à informer l’UNPFII des développements d’intérêt commun ; mais rien n’est dit concernant l’emploi de l’expression peuples autochtones. Nous espérons vivement que des discussions sérieuses auront lieu sur cette question durant les réunions du WG8(j)-8 et qu’une solide recommandation au sujet de la terminologie sera ajoutée.
Ci-après figure un résumé des arguments avancés par le FPP et 70 autres organisations de peuples autochtones, organisations communautaires, réseaux et ONG qui ont également répondu à cet appel à contributions en présentant une notification conjointe en avril 2013 contenant des recommandations complètes :
1. La CDB est issue du Sommet de la terre de Rio de 1992, et sa mise en œuvre est guidée par l’Agenda 21, qui fut également adopté lors du Sommet de Rio, et qui emploie l'expression « populations autochtones » au chapitre 15 (préservation de la diversité biologique) et au chapitre 26 (reconnaissance et renforcement du rôle des populations autochtones et de leurs communautés). La réunion du Sommet mondial sur le développement durable (SMDD) de 2002, à l’occasion du dixième anniversaire du Sommet de Rio, a réaffirmé l’importance des peuples autochtones dans le développement durable et a employé à cette fin explicitement l'expression « populations autochtones ».file:///C:/Users/Gemma/AppData/Local/Microsoft/Windows/Temporary%20Internet%20Files/Content.Outlook/SA05H8XZ/7_FPPENews_Oct2013_CBDIPs_CdJ_fr_edit.docx#_ftn4[4] À l’occasion du vingtième anniversaire du Sommet de Rio, la communauté internationale s’est réunie une nouvelle fois à Rio de Janeiro en juin 2012 (« Rio +20 »). Le document final de cette réunion (« L’avenir que nous voulons ») emploie également l’expression « populations autochtones ».file:///C:/Users/Gemma/AppData/Local/Microsoft/Windows/Temporary%20Internet%20Files/Content.Outlook/SA05H8XZ/7_FPPENews_Oct2013_CBDIPs_CdJ_fr_edit.docx#_ftn5[5]
2. Outre les instruments susmentionnés issus des processus de Rio, un vaste éventail d’autres instruments et de normes internationaux fait référence aux droits des peuples autochtones, dont la plupart ont été adoptés par des organisations environnementales et soulignent les liens entre la reconnaissance des droits des peuples autochtones et la conservation et la gestion durable des écosystèmes et des ressources naturelles. Ces instruments et normes sont notamment :
- la Convention de l’Organisation internationale du travail (OIT) de 1991 concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants
- un grand nombre de résolutions et de recommandations de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) en 1996, 2000, 2004, 2008, et 2012file:///C:/Users/Gemma/AppData/Local/Microsoft/Windows/Temporary%20Internet%20Files/Content.Outlook/SA05H8XZ/7_FPPENews_Oct2013_CBDIPs_CdJ_fr_edit.docx#_ftn6[6]
- les Lignes directrices pour la mise en œuvre et le renforcement de la participation des communautés locales et des populations autochtones à la gestion des zones humides de la Convention de Ramsar de 1999
- les Principes directeurs pour la prise en compte des valeurs culturelles des zones humides dans la gestion efficace des sites de la Convention de Ramsar de 2002
- plusieurs directives volontaires de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l’agriculture (FAO) : Directives volontaires à l’appui de la concrétisation progressive du droit à une alimentation adéquate dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale (2004), Gestion responsable des forêts plantées (2006), La gestion des feux (2006), les régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale (2012).
- Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles de l’UNESCO de 2005
- l’Instrument juridiquement non-contraignant concernant tous les types de forêts du Forum des Nations Unies sur les forêts de 2007, adopté dans la Résolution de l'Assemblée générale 62/98
- Accords de Cancun de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) de 2010 : résultats des travaux du Groupe de travail spécial de l’action concertée à long terme au titre de la Convention
- Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme de 2011
3. Dans la décision X/43, la CdP 10 de la CDB a décidé de « convoquer une réunion d’un groupe spécial d’experts composé de représentants des communautés locales… en vue d’identifier les caractéristiques communes des communautés locales et de recueillir des avis sur la façon dont les communautés locales peuvent participer plus efficacement aux processus de la Convention, y compris au niveau national... ». Par conséquent, la CDB a reconnu la nature distincte des peuples autochtones et des communautés locales en termes réels, mais continue à réunir ces groupes dans les références de ses textes.
4. Les Parties à la CDB (étant donné la composition quasi universelle de ses membres) représentent les mêmes États que ceux qui ont, dans tous les autres contextes internationaux, employé l’expression « peuples autochtones », notamment lors de l’adoption en 2007 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (UNDRIP) par l’Assemblée générale des Nations Unies. Cette Déclaration reconnaît que : « Les peuples autochtones ont le droit de maintenir et de renforcer leurs institutions politiques, juridiques, économiques, sociales et culturelles distinctes, tout en conservant le droit, si tel est leur choix, de participer pleinement à la vie politique, économique, sociale et culturelle de l’État » (article 5, non souligné dans le texte). Les pays qui ont voté à l’origine contre l’adoption de la Déclaration (l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Canada et les États-Unis d’Amérique) sont revenus ensuite sur leurs décisions et ont approuvé la Déclaration en 2009 (Australie) et en 2010 (Nouvelle-Zélande, Canada et États-Unis).
En conclusion, la CDB est le seul organe décisionnel d’une convention internationale qui emploie encore l’expression « communautés autochtones et locales ». Il est grand temps que la CDB reconnaisse enfin officiellement les peuples autochtones en tant que peuples.
Pour plus d’informations :
La notification complète à la CDB, qui comprend des arguments supplémentaires et plus spécifiques, est disponible en français, anglais et espagnol ici : http://www.forestpeoples.org/fr/topics/convention-sur-la-diversite-biologique-cdb/publication/2013/notification-la-convention-sur-la
La huitième réunion du Groupe de travail sur l’article 8 j) se tiendra du 7 au 11 octobre 2013 à Montréal, au Canada. Plus d’informations sur cette réunion, y compris les documents officiels et les documents d’information sont disponibles ici : http://www.cbd.int/doc/?meeting=WG8J-08
file:///C:/Users/Gemma/AppData/Local/Microsoft/Windows/Temporary%20Internet%20Files/Content.Outlook/SA05H8XZ/7_FPPENews_Oct2013_CBDIPs_CdJ_fr_edit.docx#_ftnref3[3] http://www.forestpeoples.org/fr/topics/convention-sur-la-diversite-biologique-cdb/news/2012/12/les-parties-la-convention-sur-la-dive
file:///C:/Users/Gemma/AppData/Local/Microsoft/Windows/Temporary%20Internet%20Files/Content.Outlook/SA05H8XZ/7_FPPENews_Oct2013_CBDIPs_CdJ_fr_edit.docx#_ftnref4[4] Déclaration de Johannesburg sur le développement durable, § 25.
file:///C:/Users/Gemma/AppData/Local/Microsoft/Windows/Temporary%20Internet%20Files/Content.Outlook/SA05H8XZ/7_FPPENews_Oct2013_CBDIPs_CdJ_fr_edit.docx#_ftnref5[5] Résolution adoptée par l’Assemblée générale 66/288, « Le futur que nous voulons », § 197.
file:///C:/Users/Gemma/AppData/Local/Microsoft/Windows/Temporary%20Internet%20Files/Content.Outlook/SA05H8XZ/7_FPPENews_Oct2013_CBDIPs_CdJ_fr_edit.docx#_ftnref6[6] http://www.forestpeoples.org/sites/fpp/files/publication/2010/04/iucnrecommendationsonipstable-2012.pdf
Overview
- Resource Type:
- Noticias
- Publication date:
- 1 octubre 2013
- Programmes:
- Cultura y conocimientos Gobernanza Ambiental Conservación y derechos humanos