Le recours aux « problèmes de sécurité » pour saisir les terres des communautés à des fins de « conservation »

Ce document est numéro 2 de la série de breifings Transformer la Conservation: du conflit à la justice
Depuis l’Est du Congo jusqu’à la côte du Kenya, les crises de « sécurité » sont utilisées pour évincer les peuples des forêts, engendrant ainsi une plus grande insécurité. Nous comparons cette pratique en rapport avec les Batwa dans l’actuel parc de Kahuzi-Biega (RD Congo), avec les Ogiek dans les années 1980 et les Benet Mosopisyek en 2008 dans le parc du Mont Elgon (Ouganda) et avec les Aweer de 1963 à 1967 dans le comté de Lamu (Kenya).
Les terres des peuples des forêts sont souvent déclarées « aires protégées » par l’État. En conséquence, les peuples des forêts sont expulsés de leurs terres ancestrales et il leur est interdit d’y retourner ou d’y avoir accès, et la « gestion » de ces terres est confiée aux autorités de conservation.
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Les terres des peuples des forêts peuvent comprendre des zones où se posent des problèmes de sécurité. Plusieurs des endroits où les peuples des forêts essaient de protéger leurs droits sur leurs terres traditionnelles sont aussi utilisés et disputés par d’autres acteurs plus puissants. Certains se trouvent sur des frontières nationales ou à proximité, certains regorgent de ressources naturelles qui suscitent des intérêts économiques (souvent grâce aux siècles de bonne gestion communautaire précédant leur dépossession), certains se trouvent dans des pays où la gouvernance est déficiente – et plusieurs sont touchés par tous ces facteurs en même temps.
Les problèmes de sécurité ne découlent pas des activités ni des actions des peuples des forêts. De sérieux problèmes de sécurité sont causés par des groupes armés qui n’ont aucun lien avec les peuples des forêts et sont financés ou soutenus par des acteurs économiques ou politiques qui n’ont rien à voir avec les communautés sur le terrain.
Les autorités nationales et de conservation se servent des préoccupations en matière de sécurité comme excuse pour contester les revendications légitimes des peuples des forêts concernant leurs terres ancestrales. Une crise de sécurité sert souvent d’excuse pour affirmer le contrôle des terres ancestrales des peuples des forêts par les autorités de conservation et justifier leur expulsion et les mauvais traitements qui leur sont infligé
Points clés:
- Les terres des peuples des forêts sont souvent déclarées aires protégées par les États, qui accordent ainsi aux autorités de conservation le droit de contrôler et de gérer les terres.
- Des préoccupations légitimes de sécurité sont utilisées par les gouvernements et les autorités de conservation pour effectuer de violentes expulsions qui ne seraient peut-être pas possibles autrement.
- Une fois la crise de sécurité apaisée et la situation revenue à la normale, les communautés n’ont pas le droit de retourner sur leurs terres.
- Dans ces quatre cas, les motifs réels de l’expulsion des communautés préexistent à la crise de sécurité et n’ont rien à voir avec elle.
- Ces expulsions ne contribuent ni à conserver la sécurité ni à sécuriser la conservation.
À propos de cette série de briefings:
En 2003, dans le cadre du 5e Congrès mondial sur les parcs tenu à Durban, le monde de la conservation s’est engagé à restituer aux peuples autochtones des terres qui avaient été transformées en aires protégées sans leur consentement et à ne créer de nouvelles aires protégées qu’avec leur plein consentement et leur participation à part entière. Ces engagements ne se sont pas concrétisés. Cette série présente des études de cas, des témoignages, des recherches et analyses du FPP et de nos partenaires concernant l’état actuel de la relation entre le monde de la conservation et les peuples autochtones et communautés locales ayant des liens collectifs avec leurs terres. Elle mettra au jour des difficultés et des injustices liées aux activités de conservation, présentera des voies pratiques et positives à suivre, menées par les communautés locales et les peuples autochtones eux-mêmes, pour prendre soin des terres et des écosystèmes et se penchera sur des pistes permettant d’assurer plus généralement une conservation juste et équitable.
Overview
- Resource Type:
- Briefing Papers
- Publication date:
- 18 July 2022
- Region:
- Democratic Republic of Congo (DRC) Kenya Uganda
- Programmes:
- Conservation and human rights Territorial Governance Culture and Knowledge
- Partners:
- Chepkitale Indigenous People Development Project (CIPDP)