Le peuple wapichan et le gouvernement guyanais conviennent d’un mandat pour des pourparlers formels sur la question foncière
Le peuple wapichan du sud du Guyana demande la reconnaissance de ses droits à son territoire traditionnel depuis 1967 au moins, année au cours de laquelle il a déposé une demande formelle devant la Commission des terres amérindiennes (Amerindian Lands Commission - ALC). Le rapport de l’ALC de 1969 estimait que la superficie identifiée par les Wapichan était trop étendue pour être administrée par les Wapichan. L’ALC avait au contraire recommandé l’octroi de titres pour des superficies moins étendues, situées autour de plusieurs villages. Ces zones reçurent un titre en 1976. Cependant, les Wapichan ont sans cesse demandé que l'ensemble de leur territoire soit juridiquement reconnu et protégé, sans tenir compte des anciens titres octroyés pour des zones plus petites, et affirment qu'ils sont tout à fait capables de gérer et contrôler leurs terres et ressources. Ils ont mené plusieurs projets à cette fin, par exemple de cartographie, de documentation des utilisations et des régimes coutumiers, d’élaboration d’un plan de gestion, et de développement et de mise en œuvre des initiatives de surveillance territoriale.
Leur travail a été reconnu lorsque la South Central Peoples Development Association, qui est une fédération de communautés wapichan du Guyana, a remporté le Prix Équateur 2015 du PNUD et que par la suite, le gouvernement du Guyana a décerné à l’association la Médaille nationale du mérite. Ils ont également présenté des demandes formelles d’extension de leurs titres fonciers existants conformément à la Loi amérindienne de 2006 pour couvrir l’ensemble de leur territoire traditionnel plutôt que les petites parties ayant déjà des titres fonciers.
En octobre 2015, les Wapichan, par l’intermédiaire du Conseil de district du Sud-Rupununi, ont écrit au Président du Guyana, S.E. David Granger, demandant que le gouvernement entame un processus de pourparlers formels visant à régler leurs problèmes en matière de droits fonciers. Le Président a envoyé une réponse positive en novembre 2015 et a délégué la responsabilité de ces pourparlers au Ministère des affaires des peuples autochtones (MIPA). Suite à des discussions internes entre les dirigeants des communautés puis au sein de chaque communauté, les Wapichan ont proposé un projet de mandat pour des pourparlers formels qu’ils ont présenté au MIPA. Ce mandat a été examiné en détail par une délégation gouvernementale et les Wapichan à l’occasion d’une réunion de deux jours en avril 2016. La réunion s’est tenue dans les villages de Potarinau, un site choisi pour son lien historique avec l’un des dirigeants wapichan qui avait présenté la demande de 1967 à la Commission des terres amérindiennes. La délégation gouvernementale était une délégation de haut niveau composée du Vice-président et du Ministre des affaires des peuples autochtones, Sydney Allicock, et de deux de ses conseillers principaux. Après la négociation de plusieurs amendements au mandat, le Ministre Allicock et Toshao Nicholas Fredericks ont signé le mandat respectivement au nom du MIPA et des Wapichan.
Le mandat régit le processus de pourparlers formels, dont l’objectif principal est de « convenir des mesures requises pour résoudre de manière juste et définitive les revendications en matière de droits fonciers et territoriaux des peuples autochtones conformément au droit en vigueur, à travers un processus basé sur l'égalité et le respect mutuel qui garantisse et respecte le consentement libre, préalable et éclairé des peuples autochtones ».
Le terme « droit en vigueur » se réfère aux lois du Guyana, y compris à la Loi amérindienne de 2006 et à la Constitution, ainsi qu’aux normes internationales des droits humains contraignantes pour l’État. Le mandat couvre une série de questions, notamment : la recherche d’un accord sur les principes et le processus qui seront employés pour évaluer les demandes de titres qui ont été présentées par les 17 communautés wapichan et prendre une décision sur ces demandes ; définir quand et comment le consentement libre, préalable et éclairé des Wapichan sera demandé et obtenu dans le cadre de ce processus ; et le traitement sur un pied d’égalité des informations, des cartes et des études produites par les Wapichan, ce qui n’est pas requis par le droit actuellement en vigueur.
Il s’agit d’une avancée historique. Pour la première fois, le Guyana a accepté d’entamer des pourparlers structurés avec les peuples autochtones en vue de régler les questions foncières non résolues. Cela représente également un changement d’approche significatif par rapport à la méthode de prise de qui s’appliquait jusque très récemment sur cette question et qui était décisions en grande partie unilatérale. La première réunion des parties a eu lieu en mai 2016 et des progrès substantiels ont été accomplis sur plusieurs points. Par ailleurs, les questions à examiner lors de la deuxième réunion prévue en juillet 2016 ont été arrêtées. Les pourparlers ont été menés dans un esprit ouvert de collaboration. Bien qu’il ne s’agisse pour l’instant que de négociations, les Wapichan sont prudemment optimistes et espèrent qu’un accord pourra être conclu au moyen de ce processus au sujet de la protection de leurs terres, source depuis longtemps de préoccupations, qui se sont intensifiées au cours des derniers mois avec l’invasion massive de deux zones de leur territoire par des chercheurs d’or. S’il est couronné de succès, ce modèle pourrait être employé par d’autres peuples autochtones au Guyana.
Fergus MacKay, Forest Peoples Programme
Overview
- Resource Type:
- News
- Publication date:
- 26 July 2016