La Commission Africaine des Droits de l’homme et des peuples: Briefing du FPP - Octobre 2001
Ce briefing a été réalisé grâce à une subvention de la Ford Foundation
Ce briefing présente une vue générale du système africain de protection des droits de l’homme et des peuples. Celui-ci est basé sur la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples et appliqué par la Commission Africaine du même nom. Bien que ce système présente certaines insuffisances, qui sont dus en particulier aux pouvoirs limités de la Commission de faire appliquer les dispositions, et à des restrictions concernant les droits reconnus dans la Charte Africaine, il est toutefois un instrument qui pourrait se révéler utile pour les peuples autochtones et leurs organisations en Afrique. Bien que la procédure à suivre pour saisir la Commission soit évoquée dans ce document, le but de ce briefing n’est pas de faire une présentation détaillée de cette procédure.1 La Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples
En 1981, les États membres de l’Organisation de l’Unité Africaine ont adopté la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, appelée également « la Charte de Banjul », en tant qu’instrument principal pour la protection des droits de l’homme en Afrique. [1] Cette Charte est un traité international auquel doivent se conformer sur un plan légal les États qui l’ont ratifiée et qui a pour objectif d’établir des standards internationaux en matière de conduite que doivent respecter les États africains. Cette Charte a été ratifiée jusqu’à présent par 53 États africains.
A. Les droits énoncés dans la Charte
Cette Charte contient deux types de droits principaux:
Les droits des individus (Arts. 3-17), tels que le droit à bénéficier d’une totale égalité devant la loi; au respect de la vie, à la liberté et l’interdiction de la torture, de traitements cruels, inhumains ou dégradants, de l’esclavage et d’autres formes d’exploitation; le droit à ce que sa cause soit entendue; de participer à la direction des affaires publiques; de se réunir avec d’autres; de constituer librement des associations, à la pratique libre de la religion, à la liberté de conscience, de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un État; à la santé, au travail et à l’éducation, ainsi que le droit de propriété, bien que l’on peut y porter atteinte par « nécessité publique».
Les droits des peuples (Arts. 19-24), tels que le droit des peuples à l’égalité et l’interdiction de la domination d’un peuple par un autre; le droit à l’existence et à l’autodétermination; le droit des peuples à la libre disposition de leurs richesses et de leurs ressources naturelles, et au développement économique, social et culturel, ainsi que le droit à un environnement satisfaisant propice à leur développement.
Bien que certains détracteurs aient affirmé que «les droits des peuples» se réfèraient uniquement aux droits détenus par tous les individus d’un État donné, la Commission a clairement interprété ces termes comme signifiant les droits des différents peuples d’un État. Par exemple, dans un de ses rapports, elle indique « les droits de tous les peuples du Rwanda. » [2] . Elle a également affirmé à plusieurs reprises que ces peuples bénéficient du droit à l’autodétermination et des mêmes droits que ceux évoqués dans la Charte pour les autres peuples, mais que ces droits peuvent ne pas être exercés s’ils violent le principe de l’intégrité territoriale des États indépendants actuels. En clair cela signifie qu’ on ne peut pas utiliser dans certains cas le droit à l’autodétermination pour justifier une sécession éventuelle par rapport à un État indépendant et que ce droit doit être exercé sur un plan interne. [3]
Les droits des individus et des peuples sont soumis aux dispositions générales prévues par les articles 1, 2 et 26 qui stipulent respectivement que:
Les États membres de l’Organisation de l’Unité Africaine, parties à la présente Charte, reconnaissent les droits, devoirs et libertés énoncées dans cette Charte et s’engagent à adopter des mesures législatives ou autres pour les appliquer. (Art. 1) Toute personne a droit à la jouissance des droits et libertés reconnus et garantis dans la présente Charte sans distinction aucune, notamment de race, d’ethnie, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de tout autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de tout autre situation. (Art. 2) Les États parties à la présente Charte ont le devoir de garantir l’indépendance des Tribunaux et de permettre l’établissement et le perfectionnement d’institutions nationales appropriées chargées de la promotion et de la protection des droits et libertés garantis par la présente Charte. (Art 26)
Les articles 1 et 2 demandent à tous les États parties à la Charte de reconnaître les droits énoncés dans la Charte sans faire de discrimination, et à adopter des mesures législatives pour les appliquer ainsi que de s’assurer que les individus et les peuples puissent avoir recours à des Tribunaux nationaux et à des procédures administratives pour faire respecter ces droits. L’article 26 exige de manière identique que les États parties s’assurent que les Tribunaux nationaux soient indépendants et que les organisations gouvernementales et non-gouvernementales de protection des droits de l’homme puissent opérer, faire la promotion et protéger les droits énoncés dans la Charte.
Bien que cette Charte contienne un certain nombre d’éléments positifs si on se place dans le cadre général de la législation internationale relative aux droits de l’homme, les droits énoncés sont limités pour la plupart par des restrictions ou des exceptions, comme par exemple le droit de propriété mentionné ci-dessus. Les dispositions de la Charte visant à protéger les droits risquent également d’être affaiblies en raison de l’inclusion d’un chapitre contenant les devoirs des individus envers la société et envers l’État (Arts. 27-29). Bien que ces devoirs n’affaiblissent pas en eux même les droits mentionnés dans la section concernée, certains détracteurs ont affirmé qu’ils fournissent aux États un prétexte pour ne pas respecter intégralement ces droits ou tout du moins pour introduire des restrictions supplémentaires en ce qui concerne l’autorisation de l’exercice de ces droits.
La Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples et les règles de procédure de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples sont disponibles sur les sites Web suivants:
Anglais: http://www.achpr.org/english/_info/charter_en.html
Français: http://www.achpr.org/francais/_info/charter_fr.html
II. La Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples
L’article 30 de la Charte a établi la création d’une Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples chargée de « promouvoir les droits de l’homme et des peuples et d’assurer leur protection en Afrique.» Cette Commission est composée de 11 membres possédant une compétence en matière de droits de l’homme, connus pour leur haute moralité qui ne sont pas des représentants des États, mais siègent à titre personnel. Ces experts sont sélectionnés à partir d’une liste de candidats présentée par les États africains et sont élus pour une période de six ans renouvelable. Le Secrétariat de la Commission est localisé à Banjul, en Gambie.
L’article 45 de la Charte stipule quelle est la mission de la Commission, laquelle est de:
1. Promouvoir les droits de l’homme et des peuples et notamment:
(a) Rassembler de la documentation, faire des études et des recherches sur les problèmes africains dans le domaine des droits de l’homme et des peuples, organiser des séminaires, des colloques et des conférences, diffuser des informations, encourager les organismes nationaux et locaux s’occupant des droits de l’homme et des peuples et, le cas échéant, donner des avis ou faire des recommandations aux gouvernements;
(b) Formuler et élaborer, en vue de servir de base à l’adoption de textes législatifs par les gouvernements africains, des principes et règles qui permettent de résoudre les problèmes juridiques relatifs à la jouissance des droits de l’homme et des peuples et des libertés fondamentales;
(c) Coopérer avec les autres institutions africaines ou internationales qui s’intéressent à la promotion et à la protection des droits de l’homme et des peuples.
2. Assurer la protection des droits de l’homme et des peuples dans les conditions fixées par la présente Charte.
3. Interpréter toute disposition de la présente Charte à la demande d’un État partie, d’une Institution de l’OUA ou d’une Organisation africaine reconnue par l’OUA.
4. Exécuter toutes autres tâches qui lui seront éventuellement confiées par la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement.
En 1995, la Commission Africaine a adopté de nouvelles règles de procédure précisant de quelle manière la Commission opérerait [4] . Ce règlement a été établi grâce au pouvoir confié à la Commission par l’article 42(2) de la Charte.
III. La procédure à suivre pour porter plainte contre les violations des droits énoncés dans la Charte AfricaineL’article 55 de la Charte autorise les individus et groupes africains et les ONG à saisir la Commission s’ils estiment que les droits énoncés dans la Charte ont été violés par un État qui l’a ratifiée. Ces plaintes constituent le moyen essentiel utilisé par les peuples autochtones, les ONG et les autres pour demander réparation en cas de violations des droits de l’homme dans le cadre du système africain de protection des droits de l’homme. [5]
A. Qui peut porter plainte?
Des individus, des ONG, des groupes ou des peuples autochtones peuvent porter plainte pour leur propre compte ou pour le compte d’autres personnes. Il n’est pas nécessaire que l’auteur de la plainte réside dans l’État mis en cause.
B. Qui peut faire l’objet d’une plainte?
Cette plainte ne peut viser qu’un État ayant ratifié la Charte.
C. De quoi peut-on se plaindre?
Elle doit indiquer des allégations de violations des droits énoncés dans la Charte et ces violations doivent pouvoir être imputées à l’État mis en cause. Les individus, les peuples autochtones et les ONG peuvent également saisir la Commission s’ils estiment qu’il existe « un ensemble de violations graves ou massives » des droits de l’homme et des peuples ayant été commis par un État partie à la Charte (Art. 58, Charte). Dans le cas d’allégations « d’un ensemble de violations graves ou massives », la Commission peut renoncer à l’obligation de s’assurer que tous les recours internes ont été épuisés. [6]
D. Quels sont les renseignements qui doivent être inclus dans une plainte?
Les renseignements suivants doivent être inclus dans une plainte adressée à la Commission: [7]
· Le nom de l’auteur (des auteurs), son adresse, son âge et sa profession en indiquant son identité, même si celui-ci demande à la Commission de garder l’anonymat;
· Le nom de l’État partie mis en cause dans la communication;
· Le but de la communication;
· La ou les dispositions de la Charte qui ont apparemment été violées;
· Les faits;
· Des informations concernant les mesures prises par l’auteur pour s’assurer que tous les recours internes ont été épuisés, ou des indications expliquant pourquoi l’épuisement des recours internes est futile;
· Dans quelle mesure ce cas a été réglé par une autre investigation ou instance internationale.
L’obligation de s’assurer que tous les recours internes ont été épuisés signifie qu’avant de saisir la Commission, on doit utiliser et épuiser toutes les procédures judiciaires internes disponibles. Les seules exceptions à cette règle concernent les cas où les solutions proposées sont ineffectives (même si on gagne son procès devant un tribunal local, le problème ne sera pas résolu pour autant), si la question n’est pas réglée dans un délai raisonnable ou s’il n’y a pas de solution dans le cadre des lois nationales. Si l’on n’arrive pas à démontrer que tous les recours internes ont été épuisés ou qu’il s’agit d’un de ces cas exceptionnels mentionnés ci-dessus, la plainte est déclarée irrecevable et la Commission ne statue pas sur le fond de celle-ci.
E. Quelle est l’étape suivante?
La plainte est adressée initialement au Secrétaire de la Commission, qui dresse une liste des communications reçues et la soumet à l’examen de la Commission. Celle-ci en sera saisie sur la demande de la majorité absolue de ses membres (Art. 55(2), Charte, Règle 102(1)). La liste des communications reçues et soumises à l’examen de la Commission est publiée.
1. Les conditions de recevabilité
Une fois que la Commission a accepté d’examiner une plainte, elle décide si celle-ci est recevable (elle doit remplir certaines conditions nécessaires pour être examinée par la Commission). A partir de ce moment-là, la plainte sera examinée lors des sessions privées de la Commission (Règle 106). Pour que la Commission [8] décide d’examiner une plainte il faut qu’elle remplisse les conditions énoncées dans l’article 56 de la Charte (Règle 116), qui stipule que:
Les communications visées à l’article 55 reçues à la Commission et relatives aux droits de l’homme et des peuples doivent nécessairement, pour être examinées, remplir les conditions ci-après:
1. Indiquer l’identité de leur auteur même si celui-ci demande à la Commission de garder l’anonymat;
2. Etre compatibles avec la Charte de l’Organisation de l’Unité Africaine ou avec la présente Charte;
3. Ne pas contenir des termes outrageants ou insultants à l’égard de l’État mis en cause, de ses institutions ou de l’OUA;
4. Ne pas se limiter à rassembler exclusivement des nouvelles diffusées par des moyens de communication de masse;
5. Etre postérieures à l’épuisement des recours internes s’ils existent, à moins qu’il ne soit manifeste , à la Commission que la procédure de ces recours se prolonge d’une façon anormale;
6. Etre introduites dans un délai raisonnable courant depuis l’épuisement des recours internes ou depuis la date retenue par la Commission comme faisant commencer à courir le délai de sa propre saisine;
7. Ne pas concerner des cas qui ont été réglés conformément soit aux principes de la Charte des Nations Unies, soit de la Charte de l’Organisation de l’Unité Africaine et soit des dispositions de la présente Charte.
Avant que la Commission puisse déclarer une plainte recevable elle doit permettre à l’État concerné de lui fournir des informations concernant la recevabilité de cette plainte (Règle 117(1) et (2)), ou elle peut exiger des informations supplémentaires de la part de l’auteur. Si l’État ne fournit pas de déclaration écrite dans un délai de trois mois à compter de la date de réception de la demande d’informations de la part de la Commission, celle-ci peut déclarer la plainte recevable (Règle 117(4)).
Arrivé à ce point, la Commission peut déclarer une plainte irrecevable, auquel cas la procédure s’arrête (Règle 118), ou la déclarer recevable, auquel cas elle en informe l’État concerné et l’auteur et envoie à l’État le texte complet de sa décision ainsi que d’autres documents pertinents. L’État a un délai de trois mois pour envoyer des explications écrites «élucidant la question examinée et comprenant, si possible, des indications, sur les mesures prises pour remédier à la situation» (Règle 119(2)). Si l’État n’envoie pas de réponse, la Commission va agir en fonction des informations dont elle disposait avant sa demande (119(4)). En pratique néanmoins la Commission accorde souvent à l’État un délai de plus de trois mois pour répondre.
2. L’examen au fond
La phase suivante est l’examen au fond de la plainte afin de déterminer s’il y a bien eu une violation ou un ensemble de violations. Afin de prendre une décision, la Commission peut établir un groupe de travail qui ne peut être composé de plus de trois de ses membres (Règle 120(1)), et qui devra présenter des observations après avoir examiné toutes les informations écrites soumises par l’auteur et l’État concerné. Ces observations devront indiquer s’il y a eu une violation ou un ensemble de violations des droits reconnus par la Charte.
La règle 120(2) n’exige pas que les observations soient communiqués directement à l’auteur (ou aux auteurs) de la plainte, mais plutôt qu’elles restent confidentielles jusqu’à ce que la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement de l’Organisation de l’Unité Africaine décide qu’elles puissent être publiées. En fait en pratique la Commission les envoie à l’auteur. Celui-ci peut également assister aux sessions privées de la Commission au moment de l’examen de l’affaire.
Pour déterminer s’il y a eu violation des droits de l’homme, la Commission se concentre dans un premier temps sur les droits énoncés dans la Charte. Mais il est important de noter cependant que, en ce qui concerne en particulier la description des violations et les obligations de l’État concerné lorsqu’il faut adresser une plainte par écrit à la Commission, celle-ci est autorisée à prendre en considération les dispositions des divers instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ratifiés par l’État en question afin de déterminer les règles de droits appropriées pour un cas donné (Arts. 60 et 61, Charte). Ainsi, par exemple si l’État concerné a ratifié un instrument adopté par les Nations Unies ou par l’OIT qui reconnaît et garanti les droits des peuples autochtones, la Commission peut s’inspirer et tenir compte des droits énoncés dans ces instruments pour interpréter les droits reconnus par la Charte.
Les articles 60 et 61 impliquent également que les droits internationaux et africains relatifs aux droits de l’homme sont liés et renforcent le principe général qu’aucun élément de la Charte n’affaiblit les obligations des États dans le domaine des droits de l’homme conformément à d’autres instruments relatifs aux droits de l’homme qui ont été ratifiés. Autrement dit, les États ne peuvent pas invoquer la Charte Africaine pour justifier de ne pas s’être conformé entièrement ou en partie avec des obligations acceptées dans le cadre d’autres instruments internationaux.
F. Est-ce que les États doivent se conformer aux décisions de la Commission?
En théorie, les décisions de la Commission ne sont pas des obligations pour les États, mais simplement des recommandations dont l’adoption est laissée à la discrétion de l’État. Autrement dit, l’État n’est pas obligé de se conformer à la décision de la Commission. Aussi en pratique la plupart des États qui ont fait l’objet d’un examen de la part de la Commission à la suite d’une plainte, conformément à l’article 55 de la procédure, n’ont pas tenu compte de ses décisions. [9] Mais cependant la Commission a déclaré à plusieurs reprises que selon son point de vue, ses décisions sont des interprétations officielles de la Charte Africaine et que par conséquent les États parties devraient s’y conformer.
G. Que peut faire la Commission?
Un fois que la Commission a abouti à une décision après examen au fond d’une affaire, un rapport est transmis à la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement de l’Organisation de l’unité africaine, qui a le pouvoir de déterminer si elle doit procéder à des actions supplémentaires (Règle 120(2)). Mais cependant, mis à part dans certaines situations particulières, la Conférence peut alors simplement demander à la Commission de procéder à une étude approfondie de la situation et de lui rendre compte dans un rapport accompagné de ses recommandations. C’est donc en fait l’instance politique de l’OUA qui prend les décisions et a le dernier mot en ce qui concerne les mesures à prendre pour chaque plainte examinée par la Commission et sur laquelle elle a statuée. En outre, comme il a déjà été mentionné ci-dessus, les observations de la Commission et toutes les mesures prises par la Commission ou la Conférence afin de régler une question de violations de droits, restent confidentielles jusqu’au moment où la Conférence en décide autrement (Art. 59, Charte). Ceci est clairement une façon peu satisfaisante de conclure une procédure.
En revanche un point positif est le fait que la Commission peut avoir une influence sur la conduite d’un État même s’il s’agit d’une procédure confidentielle et c’est ce qui semble en effet avoir eu lieu dans le passé. Il suffit qu’une plainte ait été déposée et qu’elle soit en train de subir un examen de la part de la Commission pour que certains gouvernements remettent en cause leur conduite et que l’attention soit attirée sur les problèmes au niveau national. Enfin, avoir recours à la procédure de la Commission Africaine en ce qui concerne l’examen des plaintes aura plus d’impact si cette action est intégrée à une campagne coordonnée et plus générale ayant pour but de régler des situations où des violations sont perçues en utilisant différents moyens et si les plaignants ont les capacités et parviennent à utiliser les moyens d’information nationaux et internationaux afin de faire pression sur leur gouvernement pour qu’il respecte leurs droits.
On peut trouver dans les rapports annuels les résumés des affaires sur lesquelles s’est prononcée la Commission, certains d’entre eux étant mentionnés sur le site Web suivant:
Anglais: http://www1.umn.edu/humanrts/africa/communiques.html
IV. Les autres moyens de communiquer avec la Commission Africaine
Les organisations des peuples autochtones et les ONG ont d’autres moyens à leur disposition pour alerter la Commission sur certains sujets de préoccupation en plus de la procédure décrite ci-dessus.
1. La règle 6(3)(f) des règles de procédure de la Commission permet à une ONG de proposer d’inclure certains points dans l’ordre du jour provisoire de la session suivante de la Commission. Ces propositions doivent être soumises par écrit au Secrétaire au moins 10 semaines avant la date d’ouverture de la session (Règle 6(5)(a)) et doivent être approuvées par les deux tiers des membres de la Commission votant et présents (Règle (6)(5)(b)).
2. Les ONG peuvent demander et obtenir le statut d’observateur auprès de la Commission. Ce statut permet à l’ONG d’assister aux sessions publiques de la Commission et de recevoir les documents officiels de la Commission de façon régulière (Règle 75). Ce statut permet également à l’ONG de rencontrer plus souvent les membres de la Commission, ce qui peut devenir un avantage lorsqu’il s’agit de communiquer des sujets de préoccupations.
3. Les peuples autochtones et les ONG peuvent demander à la Commission qu’elle leur accorde un temps spécifique pour pouvoir la consulter (Règle 76) ou bien la Commission peut inviter des représentants des peuples autochtones ou des ONG à contribuer à leurs investigations ou à d’autres activités (Règle 76 et Art. 46, Charte)
4. Les peuples indigènes et les autres peuples peuvent fournir des informations à la Commission à propos des rapports périodiques que doivent soumettre les États parties et qui concernent les mesures prises pour tenir compte dans les lois et pratiques des droits reconnus par la Charte (Art. 46). Ces rapports périodiques doivent être soumis tous les deux ans, bien que la plupart des États africains n’ont pas respecté leurs engagements dans ce domaine; certains n’ayant pas soumis du tout de rapport, et d’autres ayant un ou deux rapports encore à soumettre pour être à jour.
V. La Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples
En 1994, L’OUA a décidé d’établir un groupe de travail composé d’experts gouvernementaux pour procéder à l’examen des possibilités de renforcer le système africain des droits de l’homme avec notamment la création d’une Cour Africaine des Droits de l’Homme. Après l’échec de plusieurs tentatives visant à approuver un projet de protocole portant création d’une Cour, l’OUA a approuvé et adopté en 1998, un protocole relatif à la Charte Africaine portant création d’une Cour Africaine des Droits de l’Homme. Celle-ci ne deviendra opérationnelle que lorsque 15 États auront ratifié le protocole, ce qui pourrait prendre un certain temps car à la fin de l’année 2000 seulement trois États l’avaient fait. [10]
Le mission de la Cour est de complémenter celle de la Commission et de faire respecter les droits garantis par la Charte ainsi que «tout autre instrument pertinent relatif aux droits de l’homme et ratifié par l’État concerné» (Art. 7, Protocole). Dans le cas de plaintes déposées par des individus ou des ONG, seulement les États qui ont ratifié le protocole et qui ont fait une déclaration spécifique conformément à l’article 36 (6) acceptant la compétence de la Cour pour recevoir de telles requêtes, doivent se conformer aux décisions rendues par la Cour. Lorsqu’elle estime qu’il y a eu violation d’un droit de l’homme, la Cour ordonne toutes les mesures appropriées pour remédier à la situation, y compris le paiement d’une compensation à la victime (Art. 27).
La création d’une Cour constitue un progrès important en matière de protection des droits de l’homme en Afrique, compte tenu en particulier des restrictions imposées par la Charte au pouvoir de la Commission Africaine. Mais cependant cette Cour ne sera pas opérationnelle avant peut-être de nombreuses années et on ignore encore combien d’États feront la déclaration permettant aux individus et aux ONG de faire respecter les droits mentionnés.
Le protocole portant création d’une Cour Africaine des Droits de l’Homme est disponible sur le site Web suivant:
Anglais: http://www1.umn.edu/humanrts/africa/draft_additl_protocol.html
VI. Le groupe de travail de la Commission Africaine sur les peuples / communautés autochtones en AfriqueLe 6 novembre 2000, La Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples a décidé d’établir un groupe de travail sur les droits des peuples / communautés indigènes dont le mandat est de:
· examiner le concept des peuples et des communautés autochtones en Afrique ;
· étudier les implications de la Charte Africaine sur les droits de l’homme et le bien-être des communautés indigènes en particulier en ce qui concerne :
§ le droit à l’égalité (Articles 2 et 3)
§ le droit à la dignité (Article 5)
§ la protection contre la domination (Article 19)
§ le droit à l’autodétermination (Article 20) et
§ la promotion du développement culturel et de l’identité (Article 22)
· considérer les recommandations appropriées pour le contrôle et la protection des droits des communautés autochtones.
Ce groupe de travail est important et ses travaux doivent être suivis de près pour un certain nombre de raisons. Premièrement, c’est la première fois que la Commission Africaine s’intéresse à la situation des peuples autochtones en Afrique et aux droits qui, conformément à la Charte, s’appliquent à eux. Deuxièmement, la Commission a pour mandat de prendre en considération les droits des peuples tout autant que ceux des individus. Troisièmement, le groupe de travail compte des autochtones parmi ses membres. Enfin, le groupe de travail peut décider qu’il n’y a pas de peuples autochtones en Afrique ou que ce concept ne s’applique pas au contexte africain ce qui va entraîner d’autres discussions sur les droits des autochtones, tout du moins dans le système africain.
VII. L’Institut pour les Droits Humains et le Développement en AfriqueL’ Institut pour les Droits Humains et le Développement en Afrique est une ONG ayant son siège en Gambie, et qui fournit un certain nombre de services à des organisations et individus qui veulent utiliser ou connaître davantage le système africain des droits de l’homme. D’après les informations contenues sur son site Web, l’Institut offre les services suivants:
· Il organise des sessions de formations pratiques de renforcement des capacités sur la documentation, la préparation et la soumission de cas de violations de droits humains à la Commission Africaine.
· Il joue le rôle de conseil des individus et des ONG qui ont saisi la Commission Africaine et introduit des plaintes contre des États parties à celle-ci.
· Il réunit dans ses publications l’expertise de ceux qui ont travaillé dans le système africain, ainsi que de la documentation vitale.
· Il conduit des recherches sur des domaines de droits humains émergents, cette démarche étant un premier pas vers le développement du contentieux stratégique, lequel contribuera à la jurisprudence africaine sur les droits humains.
· Il coopère dans ses travaux avec différentes ONG partenaires et procure du soutien institutionnel à certaines.
L’adresse de l’Institut est la suivante:
P.O. Box 1896, Banjul, The Gambia Tel.: 220-496-421 / 495330 / 495331 / 495398 Fax: 220-494-178 Email:Info@AfricanInstitute.org
Site Web: http://www.africaninstitute.org/
VIII. Ratifications de la Charte Africaine (en date de Janvier 2001) [11]
NO.
PAYS
DATE DE LA SIGNATURE
DATE DE LA RATIFICATION /ADHÉSION
DATE DU DÉPOT
1.
Afrique du Sud
09/07/96
09/07/96
09/07/96
2.
Algérie
10/04/86
01/03/87
20/03/87
3.
Angola
02/03/90
09/10/90
4.
Bénin
20/01/86
25/02/86
5.
Botswana
17/07/86
22/07/86
6.
Burkina Faso
05/03/84
06/07/84
21/09/84
7.
Burundi
28/07/89
30/08/89
8.
Cameroun
23/07/87
20/06/89
18/09/89
9.
Cap-Vert
31/03/86
02/06/87
06/08/87
10.
Centrafricaine, Rép.
26/04/86
27/07/86
11.
Comores
01/06/86
18/07/86
12.
Congo
27/11/81
09/12/82
28/07/87
13.
Congo (RD)
23/07/87
20/07/87
28/07/87
14.
Côte d’Ivoire
06/01/92
31/03/92
15.
Djibouti
20/12/91
11/11/91
31/03/92
16.
Égypte
16/11/81
20/03/84
03/04/84
17.
Érythrée
14/01/99
15/03/99
18.
Éthiopie
15/06/98
22/06/98
19.
Gabon
26/02/82
20/02/86
26/06/86
20.
Gambie
11/02/83
08/06/83
13/06/83
21.
Ghana
24/01/89
01/03/89
22.
Guinée
09/12/81
16/02/82
13/05/82
23.
Guinée-Bissau
04/12/85
06/03/86
24.
Guinée équatoriale
18/08/86
07/04/86
18/08/86
25.
Kenya
23/01/92
10/02/92
26.
Lesotho
07/03/84
10/02/92
27/02/92
27.
Libéria
31/01/83
04/08/82
29/12/82
28.
Libye
30/05/85
19/07/86
26/03/87
29.
Madagascar
09/03/92
19/03/92
30.
Malawi
13/11/81
17/11/89
23/02/90
31.
Mali
13/11/81
21/12/81
22/01/82
32.
Maurice
27/02/92
19/06/92
01/07/92
33.
Mauritanie
25/02/82
14/06/86
26/06/86
34.
Mozambique
22/02/89
07/03/90
35.
Namibie
30/07/92
16/09/92
36.
Niger
09/07/86
15/07/86
21/07/86
37.
Nigeria
31/08/82
22/06/83
22/07/83
38.
Ouganda
18/08/86
10/05/86
27/05/86
39.
Rwanda
11/11/81
15/07/83
22/07/83
40.
Sahrawi, Rép. démocratique arabe
10/04/86
02/05/86
23/05/86
41.
Sao Tomé et Principe
23/05/86
28/07/86
42.
Sénégal
23/09/81
13/08/82
25/10/82
43.
Seychelles
13/04/92
30/04/92
44.
Sierra Léone
27/08/81
21/09/83
27/01/84
45.
Somalie
26/02/82
31/07/85
20/03/86
46.
Soudan
03/09/82
11/03/86
47.
Swaziland
15/09/95
09/10/95
48.
Tanzanie
31/05/82
18/02/84
09/03/84
49.
Tchad
29/05/86
09/10/86
11/11/86
50.
Togo
26/02/82
05/11/82
22/11/82
51.
Tunisie
16/03/83
22/04/83
52.
Zambie
17/01/83
10/01/84
02/02/84
53.
Zimbabwe
20/02/86
30/05/86
12/06/86
[1] Mise en vigueur le 21 Octobre 1986.
[2] Résolution sur la Situation au Rwanda, Seventh Annual Activity Report of the African Commission on Human and Peoples’ Rights, 1993-94. ACHPR/APT/7th, Annexe XII, paragraphe 2.
[3] C’est essentiellement la position adoptée par le Groupe de travail sur les populations autochtones des Nations Unies lorsqu’il a élaboré la déclaration sur les droits des populations autochtones des Nations Unies.
[4] Règles de procédure de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, adoptées le 6 octobre 1995.
[5] Si des instruments des Nations Unies permettant aux peuples autochtones de saisir les organisations de protection des droits de l’homme des Nations Unies ont été ratifiés, ceux-ci peuvent s’adresser aux Nations Unies plutôt qu’au système africain.
[6] Communication Nos. 25/89, 47/90, 56/91 et 100/93.
[7] Voir notamment l’article 56 de la Charte et la règle 104.
[8] La Commission peut établir un groupe de travail composé de trois de ses membres afin d’examiner la recevabilité d’une plainte (Règle 113).
[9] Sur la question générale de l’obligation des États à se conformer, voir, Non-compliance of State Parties to Adopted Recommendations of the African Commission: A Legal Approach, DOC/OS/50b (XXIV).
[10] Sénégal, Gambie et Burkino Faso.
[11] Source: Bibliothèque des Droits de l’Homme de l’Université du Minnesota.
Overview
- Resource Type:
- Reports
- Publication date:
- 1 October 2001
- Programmes:
- Conservation and human rights Access to Justice Law and Policy Reform Legal Empowerment